Recherche en bref : une nouvelle étude sur les systèmes de partage de voitures électriques
Des systèmes de partage de voitures électriques ont été mis en place dans de nombreuses villes du monde entier dans le cadre d’actions politiques visant à réduire la pollution et les embouteillages, notamment dans les zones urbaines. Deux des facteurs clés pour développer des systèmes efficaces sont la compréhension des motivations sous-jacentes des consommateurs et les différents modèles d'utilisation.
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Une nouvelle étude publiée dans les Annals of Operations Research se concentre sur un système de partage de véhicules électriques mis en place dans la ville de Shenzhen en Chine et vise à faire la lumière sur ces deux facteurs.
Des chercheurs de l’IÉSEG School of Management et du Beijing Institute of Technology ont recueilli et analysé des données provenant des capteurs embarqués de 3 100 véhicules électriques, soit environ 1,03 million de données de conduite utilisées dans le cadre de ce système de partage de véhicules. Ils ont également calculé les émissions de carbone par kilomètre et les ont comparées pour différents types d’utilisation.
Les résultats mettent en évidence différents modes d’utilisation et des résultats inattendus en matière d’émissions
« Les gens supposent souvent que ces systèmes sont généralement utilisés pour les déplacements de courte distance et qu’ils réduisent automatiquement les émissions de carbone », explique le professeur Chavi FLETCHER-CHEN de l’IÉSEG. Cependant, les résultats de ce programme en Chine montrent qu’il existe en fait un certain nombre de modèles d’utilisation différents et qu’il y a eu des résultats inattendus en termes d’émissions de carbone.
Le système a en effet été utilisé pour des trajets courts (souvent à l’intérieur de la ville), par exemple pour aller au travail, dans les magasins, les restaurants ou même les hôpitaux. Cependant, il a également été utilisé pour des trajets plus longs et des durées de location plus longues, par exemple pour des raisons professionnelles ou même pour le tourisme. Les trajets les plus longs pouvaient même dépasser 166 km minimum (jusqu’à 400 km) et durer plusieurs heures.
L’utilisation dans les zones urbaines était principalement concentrée dans les zones commerciales et résidentielles, non seulement aux heures de pointe du matin et du soir, mais aussi autour de midi. L’utilisation importante pendant les week-ends et les jours fériés montre également que ces systèmes sont utilisés pour diverses raisons non professionnelles.
Enfin, l’étude a également mis en évidence que ces systèmes étaient également utilisés en combinaison avec les transports publics (comme le métro/le train…).
Les déplacements de courte distance n’ont pas apporté les avantages environnementaux escomptés
En termes d’émissions, le professeur FLETCHER-CHEN note que les déplacements de courte distance n’ont pas apporté les avantages escomptés en matière de réduction des émissions de carbone. « Nous avons constaté que les émissions de carbone par unité de kilométrage des déplacements de courte distance étaient encore plus élevées que celles des véhicules à carburant traditionnel (jusqu’à 500 g/km, soit presque le double de celles des véhicules ordinaire). Au contraire, les modes de déplacement à longue distance ont eu les meilleurs effets de réduction des émissions, même si les émissions globales étaient plus élevées. » Elle note que cela pourrait être en partie lié à la vitesse de déplacement, les trajets courts étant généralement associés à des temps de trajet plus lents.
Applications pratiques
Les chercheurs notent que ces résultats ont plusieurs applications pour les fournisseurs de tels systèmes et les décideurs politiques. Pour les personnes qui ont l’intention d’utiliser ces systèmes pour des déplacements de courte distance, ils affirment que des conseils peuvent être donnés aux utilisateurs sur le niveau d’émissions afin que les consommateurs en soient conscients et puissent prendre des décisions en connaissance de cause.
Ils expliquent également que les opérateurs de systèmes de partage de véhicules électriques pourraient envisager de proposer des tarifs différents (par km) en fonction du kilométrage total : par exemple, plus le trajet est long, plus le prix unitaire est bas.
Pour rassurer les utilisateurs qui s’inquiètent des problèmes de charge des batteries, l’article souligne également l’importance d’améliorer la disponibilité des installations de recharge dans les zones où la demande des consommateurs est la plus forte, en se basant sur des données réelles. Dans le cas de Shenzhen, il s’agit par exemple des restaurants et des zones commerciales. De même, ils soulignent l’importance d’assurer la disponibilité d’installations de recharge à proximité des transports publics, ce qui peut favoriser la poursuite des déplacements à faible émission de carbone dans les métros, les bus et les trains.
Enfin, les décideurs politiques peuvent envisager ce qu’ils appellent l’optimisation du stationnement et les politiques de stationnement préférentiel. Il peut s’agir de tarifs de stationnement subventionnés pour les utilisateurs de ces systèmes, ou d’espaces de stationnement exclusifs dans les parcs publics afin d’éviter que les utilisateurs ne soient dissuadés d’utiliser le système.
De plus amples informations sont disponibles dans l’article :
* »Sustainable operations in electric vehicles’ sharing: behavioral patterns and carbon emissions with digital technologies »(Annals of Operations Research (2023) Bin Zhang & Yi Yi (Beijing Institute of Technology), Chavi Chi-Yun Fletcher-Chen (IÉSEG School of Management, Univ. Lille, CNRS, UMR 9221 – LEM – Lille Economie Management), Pengyu Zou & Zhaohua Wang (Beijing Institute of Technology)