Comprendre l’impact des contraintes de crédit environnemental (CCE) : perspectives de la Chine
Les gouvernements du monde entier s'efforcent de mettre en place un développement durable tout en luttant contre les conséquences environnementales d'une croissance économique rapide. La Chine, , comme beaucoup d'autres pays, a mis en œuvre diverses mesures pour réduire la pollution. Parmi celles-ci, les contraintes de crédit environnemental (CCE) sont apparues comme l'un des outils permettant d'influencer le comportement des entreprises en matière de réduction de la pollution. Des experts de l'IÉSEG, de l'Université de finance et d'économie de Nanjing, de l'Université normale de Nanjing et de l'Université de finance et d'économie d'Anhui ont analysé la mise en œuvre de ces mesures en Chine afin de déterminer leur impact sur la réduction de la pollution.
Partage
Les CCE sont mis en œuvre sous la forme de dispositifs de crédit basés sur les performances, conçus pour réguler et contrôler les niveaux de pollution. Ils constituent un outil essentiel pour les décideurs politiques, car ils influencent le comportement des entreprises afin de réduire les émissions nocives. Ces contraintes s’inscrivent dans le cadre plus large d’un système de crédit environnemental, englobant des pratiques telles que l’établissement d’une liste noire des entreprises qui enfreignent les réglementations environnementales.
Des études antérieures ont montré que le renforcement de ces systèmes de crédit peut améliorer la capacité des créanciers à évaluer correctement les risques environnementaux associés aux différentes méthodes de production, ce qui permet d’offrir de meilleures options de financement aux entreprises qui utilisent des technologies respectueuses de l’environnement tout en limitant les options de crédit disponibles pour les gros pollueurs (Du et al., 2022). En outre, elles peuvent façonner le comportement futur des entreprises, en améliorant leur intégrité et leur comportement en matière environnementale, tout en promouvant la notion de production respectueuse de l’environnement (Qiu et al., 2016).
Étude du système de liste noire en Chine
Une étude récente* s’est penchée sur le système chinois de liste noire pour les délits liés à l’environnement afin d’analyser les effets de ces mesures sur la réduction de la pollution. Ce système de liste noire vise à empêcher les entreprises qui commettent des infractions de participer aux activités d’approvisionnement (comme la réponse aux appels d’offres), à augmenter leurs taux d’assurance responsabilité civile en matière de pollution environnementale, à limiter la portée de leurs activités commerciales et à restreindre leurs canaux de financement.
Cependant, certaines entreprises qui enfreignent la législation environnementale continuent à bénéficier d’avantages considérables en matière d’autorisations administratives, de marchés publics, d’aides financières, etc. Un cadre incitatif conçu pour punir ces infractions en restreignant l’accès au crédit par le biais des CCE est donc conçu pour augmenter le coût de la fraude.
Sur la base d’un échantillon de 287 villes chinoises entre 2008 et 2018, les chercheurs ont constaté que la pratique consistant à mettre sur liste noire les entreprises qui enfreignent la réglementation environnementale, aidait les décideurs politiques à contrôler la pollution et donc à promouvoir un développement économique plus durable sur le plan environnemental.
Les CCE et l’efficacité de la réglementation
Ils ont également montré que les systèmes de crédit environnemental contribuaient à améliorer l’efficacité de la réglementation et à renforcer le dispositif existant de pénalisation des comportements contraires à la réglementation, dans le cadre duquel le gouvernement et la société appliquent conjointement la règlementation en matière d’environnement. Ils ont fortement incité les entreprises chinoises à accroître leurs investissements en recherche et développement, à améliorer l’efficacité de l’utilisation de l’énergie et des ressources et à réduire le niveau des résultats socialement indésirables générés par la production.
Fait important, ils ont également constaté que les CCE sont particulièrement efficaces dans les régions où les entreprises sont très dépendantes du crédit et où la concentration d’entreprises manufacturières est relativement élevée. Ils ont également constaté que les effets de réduction de la pollution étaient significatifs dans les régions dotées d’une réglementation environnementale stricte.
Aider les décideurs politiques à contrôler la pollution environnementale
Selon Zhiyang SHEN, professeur à l’IÉSEG et l’un des co-auteurs de l’étude, ce travail apporte donc une preuve que la pratique consistant à mettre sur liste noire les entreprises fautives qui enfreignent la réglementation environnementale peut aider les décideurs politiques à contrôler efficacement la pollution et donc à promouvoir un développement économique durable sur le plan environnemental. Les systèmes de crédit environnemental contribuent à améliorer l’efficacité de la réglementation et à renforcer le cadre existant de pénalisation des comportements contraires aux règles, dans lequel le gouvernement et la société appliquent conjointement la réglementation environnementale.
En termes d’implications politiques, les auteurs notent plusieurs applications de cette étude. Par exemple, ils notent que l’extension du cadre à toutes les industries fortement polluantes devrait aider considérablement les décideurs politiques à promouvoir des voies de développement plus durables.
Ils soulignent également l’importance de renforcer l’application de la loi parmi les entreprises qui enfreignent les règles, d’améliorer l’information sur les protocoles de divulgation et de renforcer la surveillance de la protection de l’environnement (par exemple avec les agences de l’environnement).
L’étude souligne donc le potentiel des CCE en tant qu’outil politique viable pour la réduction de la pollution, en offrant des incitations supplémentaires aux entreprises pour qu’elles réduisent volontairement leurs émissions et en offrant des possibilités de diversifier les stratégies que les décideurs politiques peuvent utiliser pour atténuer les effets néfastes sur l’environnement.
Favoriser un avenir plus propre et durable
En outre, les résultats donnent des indications utiles aux décideurs politiques en dehors de la Chine, en offrant un aperçu pratique de l’élaboration et de la mise en œuvre des systèmes de crédit environnemental. Ils soulignent notamment la nécessité de stratégies adaptées au niveau régional, compte tenu des différences d’environnement économique et réglementaire.
Pour aller de l’avant, les chercheurs soulignent qu’il convient de poursuivre la recherche et l’expérimentation politique afin d’affiner et d’optimiser l’utilisation des CCE et leur rôle dans la promotion d’un avenir plus propre et plus durable.
De plus amples informations sont disponibles dans leur article : « Environmental credit constraints and pollution reduction : Evidence from China’s blacklisting system for environmental fraud » (Ecological Economics, 2023) Danyang Di (School of Finance, Nanjing University of Finance & Economics), Guoxiang Li (School of Business, Nanjing Normal University), Zhiyang Shen (IESEG School of Management,), Malin Song (Anhui University of Finance and Economics), Michael Vardanyan (IESEG School of Management & CNRS, UMR 9221 – LEM – Lille Economie Management).